Le Droit à la terre : Repenser le foncier du global au local par les droits et libertés
Sous la direction scientifique d’Aurélie LAURENT, Maître de conférences en droit public, Le Mans Université
Il est proposé dans ce colloque d’étudier un droit humain en émergence, controversé et peu reconnu : le droit à la terre (« right to land »). Un tel droit opposable à l’État est déjà présent en droit des peuples autochtones, à l’échelle internationale universelle, régionale ou même constitutionnelle. Il est au coeur d’une revendication essentielle pour les peuples ayant subi une colonisation occidentale, intrinsèquement liée à la conquête de territoires. Les droits fonciers des peuples autochtones aspirent ainsi à une remédiation de cette profonde injustice coloniale qui perdure dans les ordres juridiques étatiques, même ceux ayant coupé par la voie de l’indépendance avec l’État colonial. Originaires, ancestraux ou coutumiers, collectifs, territoriaux, voire bioculturels, les droits à la terre des peuples autochtones revêtent donc des caractéristiques propres même s’ils s’ancrent dans des juridicités particulières, tant s’agissant des peuples autochtones eux-mêmes que des instruments juridiques étatiques, nationaux ou internationaux, qui les reconnaissent.
Il est ce faisant prévu de revenir sur ces spécificités des enjeux autochtones du droit à la terre, tout en s’interrogeant sur le possible élargissement à d’autres catégories de titulaires, pour satisfaire à des besoins et revendications comparables ou connexes auxquels ne répond pas ou mal, un droit fondamental pourtant, lui, largement protégé : le droit de propriété individuel. On peut en effet se demander si prendre au sérieux la vocation universelle des droits et libertés, requiert à la fois d’ouvrir les interprétations du droit de propriété aux conceptions non occidentales, mais aussi d’envisager des droits à la terre aux non-autochtones.
Ce colloque se place donc dans une perspective juridique résolument prospective, et ambitionne d’évaluer la plus-value d’une reconnaissance véritable et élargie d’un droit à la terre dans les droits et libertés internationaux et nationaux. Plutôt que de supposer d’emblée qu’un nouveau droit ne peut être qu’un outil de lutte dérisoire notamment face à un système économique désormais mondialisé et jouissant de règles bien établies, il est proposé d’apprécier l’efficacité d’un tel droit opposable pour s’atteler à des problématiques concrètes, telles que des besoins alimentaires, d’accès à l’eau, d’habitabilité ou encore la négation des spiritualités connectées au territoire. La recherche collective a aussi pour objectif de pouvoir recenser les caractéristiques communes d'un tel droit à la terre, au-delà de la diversité de ses bénéficiaires et des instruments de protection, ce qui permettrait aussi d’appuyer la nécessité de le distinguer du droit de propriété des modernes. S’agit-il d’un droit collectif, commun ou bien également individuel ? Cette terre est-elle alors obligatoirement inaliénable et délimitée strictement ? Faut-il une dimension relationnelle avec la terre (et non sur la terre en tant que chose), ou encore une portée holistique du droit à la terre (avec des composantes politique, une terre-territoire, environnementale et économique, une terre-ressource ou de subsistance, ou culturelle, une terre-sacrée ou une terre-mère) ?
Pour ce faire trois axes sont pressentis pour organiser les réflexions : les fonctions, les bénéficiaires et les justiciabilités du droit à la terre.
Ce colloque donne droit à la production d’une attestation valant pour 7h00 de formation obligatoire.